fantasmagoria
01:48 28-02-2005
solution aux interrogations affectives se trouve plus dans l’agir que dans la réflexion. C’est le remaniement de l’économie de la libido à l’intérieur de l’appareil psychique qui permet la maturation de la personnalité et non pas l’expérience affective et sexuelle. Les individus voudraient retrouver les éternels recommencements du début de la vie pulsionnelle, d’où le succès d’un film aussi trompeur et inauthentique que l’Amant.
Enfin, l’enfant vit son lien de filiation en interaction avec l’amour conjugal et l’amour parental. C’est pourquoi il éprouve la séparation d’avec ses parents comme une histoire interne d’anéantissement relatif ; un monde s’écroule, il se trouve séparé de ses parents, dans une perte de ses objets aimés que représentent son père et sa mère. Cette perte d’objet est la perte d’un état qui le renvoie à un sentiment d’abandon et à un solitude sans protection : c’est comme s’il perdait, en partie, sa source d’être dont la dissolution l’empêche de résoudre son complexe d’Oedipe parce qu’il risque de chercher des partenaires affectifs à l’image de ceux qu’il a perdu, sans changer son économie affective au cours de l’adolescence. La révolution du complexe d’Oedipe consiste à se séparer et à renoncer à l’exclusivité parentale : en cas de divorce l’enfant ne peut se défaire d’une réalité dont il est déjà séparé. C’est pourquoi, dans bien des cas, il s’agresse lui-même et doute de ses possibilités en devenant vindicatif sur le plan social comme tous ceux qui n’ont pas résolu leur Oedipe social et se complaisent à agresser les institutions et tout ce qui symbolise l’autorité. Ils restent prisonniers d’une sévère castration qu’ils s’infligent eux-mêmes.
La banalisation du divorce, comme tous les phénomènes de rupture du lien social dans nos sociétés dépressives, pose et posera de plus en plus un problème de société. En effet à cause des frustrations qu’il génère, il est source de violences et introduit de la désunion dans le lien primordial de l’enfant à ses parents. Cette déliaison fragilise son self, c’est-à-dire la capacité à être lui-même dans la continuité en assurant sa propre sécurité dans la mesure où il a pu en faire l’expérience grâce à la qualité du lien conjugal. Il est naïf de croire et impertinent de dire, voire d’expliquer à un enfant que papa et maman se séparent et que s’ils ne s’aiment plus, ils continuent de l’aimer lui, leur enfant, pour qu’il accepte cette situation. C’est faire l’impasse sur l’irrationalité de la vie affective et méconnaître que l’amour des parents pour leur enfant passe essentiellement par leur relation et pas uniquement en ligne directe. Dire à un enfant : « papa et maman ne s’aiment plus, mais ils t’aiment encore » est un non sens ! L’enfant est en droit de dire : « Si vous ne vous aimez plus, vous ne pouvez pas m’aimer ! » C’est ainsi que l’enfant vit la rupture. C’est parce que les parents s’aiment que l’enfant se sent aimé et c’est à partir de cette relation d’amour que l’enfant construit son identité. Sinon il va construire une affectivité fragilisée et insécurisée. L’enfant finalement doit organiser sa relation entre le risque d’un amour à symbolique incestueuse et d’un amour conjugal qui n’existe pas, l’enfant ne sait pas, dans ces conditions, ce qu’est un amour parental et encore moins l’amour conjugal : l’amour parental risque d’être vécu comme un amour de séduction.


Conclusions.

La capacité d’affronter les crises et de trouver des solutions qui prennent forme dans le langage avant qu’elles soient dans l’agir mais aussi l’harmonie et l’authenticité des sentiments du couple parental sont déterminants pour le développement affectif de l’enfant. La famille nucléaire a d’ailleurs un pouvoir épanouissant sur les individus plus important que les couples polygames avec des familles multimaternelles où l’enfant doit disperser sa relation d’étayage et ses identifications tout en favorisant des personnalités pas toujours efficaces. Ces familles sont à l’origine de troubles psychologiques nettement supérieurs à ceux occasionnés par la famille nucléaire comme en témoignent de nombreuses études en psychiatrie sociale.
Dans la famille nucléaire l’enfant vit un attachement qui est sécurisant et fortifiant en s’appuyant sur sa mère puis sur ses deux parents. Cette relation donne des personnalités plus efficientes. Mais la perte de cette sécurité de base crée une vulnérabilité qui pourra apparaître plusieurs années après une séparation précoce. C’est en vieillissant et surtout à l’âge adulte que vont se manifester ces carences qui empêchent, parfois, la personnalité de certains de faire face aux âges de la vie(...).
Le divorce est devenu sans doute une solution trop facile, où l’on rompt une relation sans les problèmes réels soient vraiment traités. Si, dans certains cas, la séparation est nécessaire, pour la grande majorité il faut reconnaître qu’elle n’est pas adaptée à leur situation et ne fait qu’accentuel bien des difficultés par la suite. On peut s’en défendre, mais au prix de quelle mauvaise foi ? Il serait urgent de réfléchir à ce fait de société et proposer des moyens (ils existent) aux jeunes comme aux adultes pour savoir identifier et traiter les tensions affectives avec lesquelles ils vivent. Les expériences de rupture sont toujours dangereuses pour les enfants, car ils se trouvent plus exposés aux mouvements affectifs des adultes, moins protégés, et parfois trop impliqués dans leur relation. Lorsque les parents se disputent et se séparent, l’enfant décompense facilement, il devient triste et moins performant dans sa scolarité et sa vie sociale. Il est important de parler avec lui, de verbaliser ce qu’il vit car, en introduisant une rupture en lui, on le fait entrer dans un processus de deuil et, en perdant la cohérence parentale, il perd une partie de lui-même. Il n’aura pas toujours les moyens d’exprimer ce qu’il ressent. La parole de l’enfant dans le conflit ne vient pas toujours nécessairement de lui. Il ne lui est pas toujours facile de parler de ses intérêts sans penser à ses parents, car sa vie psychologique dépend en partie de la leur. Il ne devrait pas être question pour des enfants, d’avoir à intervenir dans les conflits, voire dans le divorce des parents. Ceux qui nous disent : « Après tout, cela ne me regarde pas ! » le devinent bien et ont raison, car ils ne savent pas à quoi correspond l’amour entre deux adultes. Tenir compte de la parole de l’enfant dans le conflit ne consiste pas à lui demander de prendre parti, et encore moins de décider pour les adultes, mais plutôt d’entendre sa souffrance, ce dont il a besoin pour grandir et se nourrir affectivement.